La vie d'Emmanuel Héré (1705-1763) est assez mal connue. Pourtant, 1er architecte du Roi de Pologne Stanislas et Duc de Lorraine, Emmanuel Héré a marqué la ville de Nancy par ses constructions remarquables qui composent encore en bonne partie le patrimoine architectural de la vieille ville. En effet, la plupart des archives le concernant transférées de Nancy à Paris ont été détruites à la Révolution, de même qu'ont malheureusement disparu bon nombre de ses réalisations.

Né le 12 Octobre 1705 dans la Paroisse Saint-Sébastien à Nancy d'un père venu du Tyrol se mettre au service du duc Léopold en tant qu'Inspecteur des Travaux du Château de Lunéville, il a probablement fréquenté l'Académie des Beaux Arts de Nancy. Il a participé, en tant que petit commis puis comme Architecte suppléant à l'aménagement des bâtiments ducaux sous la férule de Germain Boffrand, concepteur du château de Lunéville. C'est dans cette ville qu'il épouse Marguerite Duquesnoy  en 1729 qui lui donnera 8 filles et 8 fils.

Sa carrière débute véritablement en 1738 lorsque le Duc de Lorraine Stanislas le nomme « 1er Architecte de sa Majesté, Capitaine du Château de Lunéville, Inspecteur des maisons et hôtels de son Altesse Royale ». Il rejoint ainsi l'exceptionnelle troupe d'artistes qui de Cyfflé et Guibal à Jean Lamour vont assurer l'embellissement de la capitale ducale qu’est Nancy. Il dirige tout d'abord l'aménagement d'édifices en cours d'achèvement :

- l'église Bonsecours (ex. Chapelle des bourguignons) qui recevra les tombeaux du roi Stanislas  et de sa fille Marie Leczinska reine de France (épouse de Louis XV) ;
- l'hôtel des Missions Royales qui abrite aujourd'hui « SciencesPo Nancy » ;
- la place d'Alliance ;
- le château de la Malgrange (partiellement disparu) ;
- le château de Commercy ;
- les tours de l'Église St-Jacques de Lunéville. 

Connaissant le goût de son protecteur pour les demeures champêtres, il construit des petits « Trianon » dans la région lunévilloise. Aujourd'hui disparus pour la plupart (Jolivet, Einville où mourra Stanislas ), Chanteheux est sans conteste le plus réussi et envié de Louis XV lui-même.

Cependant son œuvre majeure est sans conteste l'ensemble architectural qui réunit la vieille ville médiévale de René II à la ville neuve de Charles III, par les places Carrière et Royale. Cet ensemble est classé aujourd'hui dans le Patrimoine mondial par l'UNESCO. Son ambition était aussi politique : il s'agissait d'exalter l'union dynastique franco-polonaise symbolisée par la Statue de Louis XV sise au Centre de la place Stanislas. Détruite en 1792, celle-ci fut remplacée par celle du Philosophe Bienfaisant (Stanislas lui même) en 1831.

Les auteurs du temps de Dom Calmet à Montesquieu, en attribuant le rôle essentiel à Stanislas  le cantonnent, sans doute avec une certaine injustice, à un rôle « obscur maçon ... qui ne bâtit que des bicoques ». « Tout cela » dit Montesquieu en 1747, « respire le goût du Roi qui a des idées toutes à lui et a formé lui-même, son architecte et ses ouvriers ». Emmanuel Héré, a accrédité également cette thèse, en se présentant seulement comme « ... l'interprète des désirs de Stanislas ... » Mais n'est-ce pas là une rouerie d'habile courtisan ?

Quoiqu'il en soit, le Roi de Pologne lui manifesta sa reconnaissance de façon éclatante : anobli en 1751, Chevalier de l'Ordre de Saint-Michel, l'Architecte fut gratifié d'une pension annuelle de 2400 Livres, puis de 3400 £ en 1756. C'est d'ailleurs E. Héré en personne, qui eut l'honneur de présenter le 26 Août 1753 au Roi Louis XV à Versailles « le recueil des plans, élévations et coupes des châteaux, jardins et dépendances que le Roi de Pologne occupe en Lorraine ». Ces documents constituent à ce jour la source iconographique principale sur les travaux d'urbanisme de Nancy au XVIII siècle. Sa famille fut par ailleurs comblée de faveurs sous les formes les plus diverses : pensions, parrainages, bénéfices, bourses et dotes récompensèrent femme et enfants.

En homme d'affaires avisé, Emmanuel Héré sut faire fructifier les gratifications de son protecteur. Dès 1745, il bâtit des maisons à Lunéville, des pavillons sur la place Carrière, un hôtel particulier sur la place d'Alliance, exploite les domaines ruraux d'Eulmont et Coincourt, possède des intérêts dans la verrerie de Portieux. « Parvenu au faîte des honneurs et de la fortune » , il accomplit l'ambition de tout roturier en achetant la seigneurie des barons de Corny dans le bailliage de Pont à Mousson en 1753.

La fin de sa vie fut assombrie par des spéculations malheureuses (échec du procédé d'extraction de la fécule de pommes de terre pour la fabrication de poudre à perruque - 1754), les deuils familiaux et la maladie le mettait « hors d'état de vaquer à ses affaires (paralysé) ». En mécène généreux, Stanislas lui maintint néanmoins ses appointements de 1er Architecte (2400 £ annuels). C'est un homme diminué qui mourut le 2 Février 1763. Conformément à son testament de 1757, il fut inhumé dans l'Église des Carmes de Lunéville (détruite à la Révolution).

« Homme qui aima le faste, le luxe, les honneurs » comme le rappelle son biographe Pierre Marot, il est sans conteste l'un des artistes qui, sous la houlette de Stanislas, œuvra le plus pour la prospérité économique et l'éclat culturel de la Lorraine au XVIII siècle. A ce titre, notre établissement peut être fier de porter le nom de celui qui, encore aujourd'hui, contribue au rayonnement international de notre région.

J-P Beydon
Agrégé Histoire Géographie

 

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